Par Juanita Beltran / GICJ

Traduit par Sasha Granelli / GICJ

Résumé Exécutif 

Dans la nuit du 26 septembre 2014, 43 étudiants ont disparu dans l'État de Guerrero au Mexique. Cette série d'événements a secoué tout le pays, créant une vague de protestations non seulement à cause des actes de dénigrement commis contre les étudiants, mais aussi à cause des actes de corruption entre les institutions gouvernementales et les cartels de la drogue qui ont coopéré pendant la période de mandat d'Enrique Pena Nieto. En 2018, le nouveau bureau dirigé par le président Andres Manuel Lopez Obrador a créé la Commission pour l'accès à la vérité, la clarification historique et la promotion de la justice pour les violations graves des droits de l'homme, avec une unité spéciale dédiée au cas d'Ayotzinapa. Après quatre ans d'enquête, en août 2022, la Commission a remis un rapport contenant les conclusions de l'affaire.

Geneva International Centre for Justice (GICJ), condamne la série d'événements choquants survenus à Ayotzinapa. Nous exhortons le Mexique à rendre justice aux responsables, conformément aux recommandations formulées par le Comité des disparitions forcées (CED) lors de sa dernière visite.GICJ encourage le Mexique à poursuivre ses efforts en vue d'une reconstitution correcte des événements, en plaidant pour un environnement plus juste pour tous les Mexicains.

Contexte

Au Mexique, le ministère de l'éducation publique réglemente le système éducatif. Au sein de ce système, il existe différents types d'enseignement en fonction de l'âge de l'élève : l'éducation de base (école maternelle, école élémentaire et école secondaire) et l'école secondaire supérieure (lycée) sont les types d'enseignement de base. Par la suite, l'étudiant peut décider soit de commencer un apprentissage, soit d'obtenir un diplôme universitaire, soit d'aller dans les écoles "normales", qui sont spécialement conçues pour former des enseignants. Ces dernières ont été créées pour favoriser particulièrement l'éducation dans les communautés rurales, combler les lacunes en matière d'analphabétisme, et même introduire de nouvelles techniques agricoles. Malheureusement, les écoles normales ont subi ces dernières années une diminution progressive du budget du gouvernement, qui est le sponsor des écoles. En 2013, les écoles normales, lors de protestations, ont commencé à réclamer plus de ressources pour couvrir les coûts des établissements et poursuivre l'enseignement normal. En août 2014, l'assemblée de la "Federacion de Estudiantes Campesinos Socialistas de Mexico", (Fédération des étudiants paysans socialistes du Mexique) a décidé de placer le siège de la fédération dans l'école normale d'Ayotzinapa. Il était déjà prévu que les étudiants des écoles normales se rendent en voiture d'Ayotzinapa à Mexico pour la commémoration du massacre d'octobre 1968 - une autre tragédie où des manifestants ont été abattus par les forces gouvernementales. La nuit de la disparition, les étudiants ont suivi la procédure traditionnelle de cette commémoration qui consistait à réquisitionner des bus, ce que les compagnies de bus ont largement accepté. Peu après, la police d'Iguala et d'autres hommes armés ont arrêté les étudiants à Guerrero, les ont abattus et les étudiants ont ensuite disparu [1].

Cette affaire reste l'une des plus grandes violations des droits de l'homme de l'histoire récente du pays. Sous la version de l'ancien gouvernement d'Enrique Pena Nieto (2012-2018) en 2014, il a été déclaré que 43 étudiants avaient été enlevés par des cartels de la drogue et incinérés dans une décharge à Cocula. Cette version a été présentée par Nieto comme la "vérité historique". Cependant, un groupe d'experts de la Commission interaméricaine des droits de l'homme a déterminé qu'elle n'était pas scientifiquement possible. D'une part, il aurait fallu plus de 30 tonnes de bois, plus de 13 000 pneus, plus de 13 tonnes de diesel et 60 heures pour réduire en cendres 43 corps [2].  De plus, un incendie de cette ampleur aurait laissé des dégâts visibles dans la végétation à proximité. Or, aucune preuve de ces dommages n'a été trouvée.

Au cours des enquêtes, dirigées par l'ancien président Nieto, il a été prouvé que 70% des 80 détenus présentaient des lésions traumatiques d'intensité et à des endroits variables [3]. La preuve en a été trouvée dans une vidéo divulguée au public montrant un homme aux mains liées et aux yeux recouverts de ruban plastique alors qu'il est interrogé par plusieurs hommes, identifiés par diverses organisations comme étant des fonctionnaires du gouvernement. Cela a entraîné la libération de 70 suspects en raison de violations des droits de l'homme dans le cadre du processus d'enquête, affirmant que les preuves à leur encontre avaient été obtenues sous la torture ou de manière illégale et que, par conséquent, les juges avaient déterminé qu'il n'y avait pas d'éléments permettant de les condamner puisque les droits de l'homme avaient été violés au cours du processus d'interrogatoire [4].

Le gouvernement actuel d'Andrés Manuel Lopez Obrador (2018-2022) a promis au pays de faire toute la lumière sur ce terrible événement. Il a donc créé la Commission pour l'accès à la vérité, la clarification historique et la promotion de la justice pour les graves violations des droits de l'homme commises entre 1965 et 1990 et une unité spéciale chargée d'enquêter sur le cas d’Ayotzinapa. La Commission a remis le 18 août 2022 un rapport dans lequel sont publiées les conclusions déchirantes des enquêtes menées jusqu'à présent. Le sous-secrétaire aux droits de l'homme, à la population et aux migrations du ministère de l'Intérieur (Segob) et chef de la Commission présidentielle pour la vérité et l'accès à la justice dans l'affaire Ayotzinapa, Alejandro Encinas, a souligné que les enquêtes ne sont pas terminées, mais qu'elles se poursuivront jusqu'à ce que toute la vérité soit découverte et que les responsables soient poursuivis. Contrairement à la "vérité historique", le rapport et les annexes présentés sont publics, ce qui garantit le droit et l'accès à l'information dans la transparence, tant pour les mères et les pères des jeunes gens que pour les Mexicains. On y trouve des dossiers délivrés par le bureau du procureur général de la république, des messages instantanés de personnes clés dans l'affaire, ainsi que plusieurs témoignages des survivants.

Rapport de la commission pour l'accès à la vérité, la clarification historique et la promotion de la justice pour les violations graves des droits de l'homme

Le 3 décembre 2018, la Commission pour l'accès à la vérité, la clarification historique et la promotion de la justice pour les graves violations des droits de l'homme de l'affaire Ayotzinapa (CoVAJ) a été créée par décret. L'objectif de la Commission est d'enquêter sur les faits, de savoir où se trouvent les étudiants et de poursuivre les responsables. Le rapport a consisté en un processus de collecte et d'analyse des données de plus de 41 168 documents consultés dans 15 institutions du Mexique. Le 18 août 2022, la présidence de cette commission a remis un rapport dans lequel sont décrits les derniers résultats ainsi que les conclusions tirées des preuves trouvées.

En conclusion du rapport, il a été confirmé que la disparition des 43 élèves de l'école "Isidro Burgos" d'Ayotzinapa dans la nuit du 26 au 27 septembre 2014 constituait un crime d'État auquel ont participé conjointement les membres du groupe de criminalité organisée "Guerreros Unidos" et différentes agences des diverses institutions. Ce groupe a été identifié comme un mini-cartel issu de la dissolution du plus grand cartel de drogue du crime organisé mexicain dirigé par les frères Beltrán Leyva. Selon le rapport, "Guerreros Unidos" a fourni un grand nombre de tueurs à gages commandés depuis une opération centrale en coopération avec de nombreux policiers municipaux et fonctionnaires [5].

Le rapport a dévoilé que les autorités fédérales, étatiques et municipales étaient au courant de la mobilisation des étudiants depuis leur départ de l'école normale jusqu'à leur disparition, ainsi que de l'exécution des six autres personnes. En outre, les étudiants n'avaient à aucun moment l'intention de boycotter la commémoration à laquelle ils comptaient assister ce soir-là. Il a également été confirmé qu'à 22h45, le 26 septembre, l'ordre a été donné de laisser les étudiants. Par ailleurs, le soldat Julio César López Patolzin était un informateur actif au sein de l'école normale du Secrétaire de la Défense Nationale du gouvernement mexicain. Ses activités consistaient à informer le déroulement des assemblées de l’école normale et à suivre de près les mouvements des étudiants. Il a disparu avec les étudiants sans qu'aucune mesure ne soit mise en œuvre pour le rechercher et le localiser, comme le prévoit le "Protocole pour les militaires disparus" [6]. Toutes ces constatations confirment que l'Etat a bien été un acteur clé dans la disparition des corps, ainsi que dans la reconstruction d'une fausse vérité pour couvrir ces actions.

La réalité historique

Comme mentionné ci-dessus, la soi-disant réalité historique était une tentative de reconstruction de la chronologie des événements d'Ayotzinapa. Cette reconstruction des événements est le résultat des actions de plusieurs acteurs, ce qui a conduit à des contradictions, des erreurs d'argumentation et des lacunes juridiques. Parmi les actions les plus marquantes de cette version figurent l'assassinat de témoins clés de l'affaire, la torture de détenus, l'implication d'agents de l'État ou de groupes soutenus par l'État, ainsi que le déni, la dissimulation et la manipulation d'informations et d'enquêtes par les autorités gouvernementales.

Une pièce maîtresse de l'affaire est Tomás Zerón de Lucio, ancien chef de l'Agence d'investigation criminelle. Ayant quitté le pays pour vivre en Israël dans le cadre d'une demande d'asile politique, Zerón fait l'objet de deux mandats d'arrêt pour le crime de torture. L'un a été délivré par le juge de contrôle du Centre de justice fédérale pénale en 2020 et l'autre a été annoncé un an plus tard, en avril 2021. Même le président de la Commission, Alejandro Encinas, s'est rendu en Israël, où réside Zerón, pour l'interroger. Zerón a refusé l'offre et a explicitement demandé de communiquer avec ses avocats [7].

Selon l'Agence d'investigation criminelle, Zerón a ordonné la modification de la scène de crime dans la rivière San Juan. Il a ensuite sollicité la protection de l'État contre les mandats, ce que la juge Luz María Ortega a refusé le 19 novembre 2022 [8].  Le gouvernement actuel a demandé à plusieurs reprises aux autorités israéliennes d'extrader Zerón.

Fuites des Guacamayas

Le 29 septembre 2022, un groupe de pirates informatiques appelé "Guacamayas" a infiltré le serveur du Secrétariat de la défense nationale (Sedena) et a extrait 6 téraoctets d'informations confidentielles, internes comme externes. En d'autres termes, plus de 4 millions de documents confidentiels ont été extraits. Ces documents dévoilent des informations militaires recueillies au cours de la dernière décennie avec un haut niveau de détail des opérations militaires et des renseignements [9]. Selon les spécialistes, ces informations pourraient provoquer l'effondrement des institutions en raison des liens de corruption et de la répression au cours des 10 dernières années.

Parmi les archives dévoilées, les pirates ont découvert comment le gouvernement mexicain suit de près différents médias, journalistes, activistes et défenseurs des droits de l'homme ainsi que des civils d'intérêt. Les documents ont révélé des listes de journalistes filtrés comme étant "en faveur" et "contre" le gouvernement. Selon le journaliste spécialiste des cyberattaques, Alberto Escorcia, les informations recueillies par le gouvernement semblent être plus de nature intrusive que motivées par des intérêts de sécurité nationale [10].  D'une part, la fuite révèle la fragilité du secrétaire à la défense nationale au Mexique, ainsi que les différentes stratégies utilisées par le gouvernement pour surveiller plusieurs journalistes et personnalités publiques du pays.

En ce qui concerne les liens entre les autorités gouvernementales et les groupes criminels, il y avait vingt liens possibles entre les maires de l'État de Guerrero et les groupes et dirigeants des cartels de la drogue au moment de la disparition des étudiants.

Qu'a fait le Mexique jusqu’ici ?

En mars 2002, le Mexique a reconnu comme contraignante la compétence du Comité contre la torture, établi par l'article 17 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1984. En vertu de l'article 22 de la Convention, le Mexique déclare qu'il reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications présentées par ou pour le compte de particuliers relevant de sa juridiction qui prétendent être victimes d'une violation par un État partie d'une disposition de la Convention [11].

Le Mexique a signé la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (CPED) et l'a ratifiée en 2008. De plus, le 2 octobre 2020, en vertu de l'article 31 (1) de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le Mexique déclare qu'il reconnaît la compétence du Comité des disparitions forcées pour recevoir et examiner des communications présentées par ou pour le compte de personnes relevant de sa juridiction qui prétendent être victimes d'une violation des dispositions de la Convention par le Mexique [12].

Dans le dernier rapport présenté le 8 avril 2022, le Comité des disparitions forcées (CED), lors de sa visite au Mexique, a fourni plusieurs notes sur le phénomène des disparitions. Selon les informations fournies, entre 2006 et 2021, le nombre de disparitions a augmenté dans le pays, plus de 98 % d'entre elles ayant eu lieu pendant cette période. Au 26 novembre 2021, 95 121 personnes avaient été enregistrées comme disparues, dont 112 auraient disparu pendant la visite du Comité. Il a été démontré qu'il existait une étroite corrélation entre la soi-disant "guerre contre le trafic de drogue" et le nombre de disparitions. Néanmoins, le rapport indique que les disparitions sont souvent signalées entre un et deux ans après avoir été perpétrées. Cela entraîne une réduction du pourcentage d'affaires portées devant la justice. Selon les informations fournies, entre 2% et 6% des cas ont été portés devant le tribunal et seulement 36 jugements ont été rendus. Un autre facteur affectant l'impunité est l'attitude d'indifférence des institutions judiciaires face aux disparitions. Par conséquent, les victimes ne signalent plus les cas, ce qui témoigne d'un manque de confiance dans ces institutions. Le Comité a indiqué que les actes de disparition forcée continuent d'être commis directement par des fonctionnaires au niveau fédéral, étatique et municipal. En outre, des personnes impliquées dans le crime organisé avec des degrés divers de participation, de consentement ou d'omission de la part d'agents publics, sont devenues certains des principaux auteurs de disparitions.

Parmi les recommandations formulées, le rapport souligne l'urgence de mettre en œuvre une politique nationale de prévention et d'éradication des disparitions en renforçant les institutions, les recherches et les enquêtes, en assurant une coordination systématique et efficace des institutions, en supprimant les obstacles empêchant les cas de disparitions forcées d'être portés devant les tribunaux, en traitant les disparitions survenant dans le contexte de la migration, en facilitant les recherches, les enquêtes, les réparations et les efforts de mémoire liés aux cas anciens, et enfin en reconnaissant le rôle des victimes. Le Comité a défini des exigences minimales pour la mise en œuvre effective d'une politique publique visant à prévenir et à éradiquer les disparitions. Par exemple, reconnaître les différentes formes de responsabilité de l'État partie dans les cas de disparition en mettant fin aux pratiques qui entravent l'accès à la justice et perpétuent les disparitions forcées au sein des institutions de l'État, abandonner l'approche militarisée du Mexique en matière de sécurité publique conformément aux principes internationaux des droits de l'homme et veiller à ce que les institutions de sécurité soient de nature civile, et développent des programmes de formation complets, continu et coordonnés et assurent l'appropriation des réglementations nationales et internationales par les institutions, de la jurisprudence et des réglementations relatives à la disparition et à la lutte contre l'impunité [13] .

Geneva International Centre for Justice (GICJ), condamne les actions dévastatrices contre les 43 étudiants d'Ayotzinapa et exhorte le gouvernement mexicain à poursuivre les enquêtes jusqu'à ce que justice soit faite. Nous soulignons l'importance de la lutte contre la corruption à tous les niveaux nationaux, en insistant sur les conséquences désastreuses qu'elle peut avoir. GICJ encourage le Mexique à suivre les recommandations détaillées du Comité des disparitions forcées lors de sa visite au Mexique en vertu de l'article 33 de la Convention.

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(1) Luis Hernández Navarro. (2015). Ayotzinapa: el dolor y la esperanza. El Cotidiano, 189, 7–17.

(2) Caso Ayotzinapa e informe del GIEI:  Implicaciones y perspectivas. (2015). Fundación Desarrollo Humano Sustentable, 3. https://fdhs.org.mx/wp-content/uploads/2017/06/Caso-Ayotzinapa.pdf

(3) GobernaciÃ3n, S. de. (n.d.). Rinde informe presidencia de la ComisiÃ3n para la Verdad y Acceso a la Justicia en el caso Ayotzinapa. gob.mx. https://www.gob.mx/segob/prensa/rinde-informe-presidencia-de-la-comision-para-la-verdad-y-acceso-a-la-justicia-en-el-caso-ayotzinapa-311822

(4) (2022, April 4). En secreto, Encinas visita a Zerón en Israel. El Universal. https://www.eluniversal.com.mx/opinion/carlos-loret-de-mola/en-secreto-encinas-visita-zeron-en-israel

(5) Espino, M. (2022, November 19). Jueza niega amparo a Tomás Zerón contra orden de captura por caso Ayotzinapa. El Universal. https://www.eluniversal.com.mx/nacion/caso-ayotzinapa-jueza-niega-amparo-tomas-zeron-contra-orden-de-captura

(6) BBC News Mundo. (2022, October 7). Guacamaya Leaks: 5 revelaciones del hackeo masivo que sufrió el ejército de México. https://www.bbc.com/mundo/noticias-america-latina-63167331

(7) OHCHR. (n.d.). International Convention for the Protection of All Persons from Enforced Disappearance. https://www.ohchr.org/en/instruments-mechanisms/instruments/international-convention-protection-all-persons-enforced

(8) Report of the Committee on Enforced Disapperances on its visit to Mexico under article 33 of the Convention – International Convention for the Protection of All Persons from Enforced Disapperance. CED/C/MEX/VR/1

Image Source: Washington Office on Latin America (WOLA). (2017, November 9). Ficha de datos del caso Ayotzinapa: Investigando la desaparición forzada de 43 estudiantes en México. WOLA. https://www.wola.org/es/analisis/ficha-de-datos-del-caso-ayotzinapa-investigando-la-desaparicion-forzada-de-43-estudiantes-en-mexico

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