12.08.21

Dialogue Interactif avec le Rapporteur Spécial sur les droits de l’homme des migrants

23 et 24 juin 2021

47ème Session du Conseil des droits de l’homme, du 21 juin au 15 juillet 2021.

POINT 3 – Promotion et protection de tous les droits humains, droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement

Par Beatrice Serra

Résumé analytique

En 1999, la Commission des droits de l’homme des Nations Unies a créé le mandat du Rapporteur Spécial sur les droits de l’homme des migrants. Le Rapporteur Spécial est chargé de surveiller les violations des droits de l’homme commises à l’encontre des migrants et enfreignant les obligations internationales, ainsi que de proposer des recommandations pour renforcer la promotion, la protection et l’implémentation des droits humains de tous les migrants, indépendamment de leur statut.

Lors des 6ème et 8ème réunions de la 47ème session du Conseil des droits de l’homme, le Rapporteur Spécial sur les droits de l’homme des migrants a présenté un rapport. Sachant que les refoulements de migrants sont un phénomène très répandu qui représente une violation des obligations internationales des États de protéger les droits humains des migrants aux frontières internationales, particulièrement l’interdiction des expulsions collectives et du refoulement, le rapport porte sur les pratiques inhumaines de gouvernance des frontières et fait des recommandations pour résoudre les conséquences des refoulements de migrants sur terre et en mer. Les recommandations fournies par le Rapporteur Spécial apparaissent d’autant plus cruciales que les pratiques de refoulement se sont accentuées durant la pandémie de la COVID-19, exacerbant donc la situation catastrophique des migrants.

De plus, lors des 6ème et 8ème réunions de la 47ème session du Conseil des droits de l’homme, le Rapporteur Spécial sur les droits de l’homme des migrants a tenu un Dialogue Interactif sur les moyens d’aborder l’impact en droit humain des refoulements. Le Rapporteur Spécial actuel a souligné que les Etats répondent souvent aux flux migratoires par la création et le renforcement progressif des barrières, ce qui conduit au retour des migrants sans évaluation individuelle de leurs besoins de protection de leurs droits humains et des mesures de sauvegarde qui leur sont accordés. Par conséquent, le Rapporteur Spécial a invité les Etats à prendre toutes les mesures nécessaires pour cesser de telles pratiques et assurer la protection des droits de l’homme en conformité avec le droit et les normes internationales, notamment en procédant à une évaluation individuelle de la situation de chaque migrant. Certaines délégations ont exprimé leur soutien au rapport, réitérant leur plein engagement à respecter les obligations étatiques et les droits humains de tous les migrants, étant profondément préoccupées par les conclusions du rapport et les prenant sérieusement en considération. La plupart des délégations ont exprimé leur inquiétude sur l’impact de la pandémie de la COVID-19, qui exacerbe les situations de vulnérabilité, et ont souligné l’importance de l’inclusion d’une approche genrée et orientée vers l’enfant dans les politiques de migrations et dans la gouvernance des pays. La Société civile a félicité le Rapporteur Spécial pour son rapport dénonçant les refoulements qui privent les migrants de leurs droits fondamentaux en leur refusant l’accès à la protection comme définie aux niveaux national et international.

Contexte

Le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a nommé un Rapporteur Spécial sur les droits de l’homme des migrants en 1999 (Résolution 1999/44). Le mandat, dernièrement renouvelé en 2020 par la résolution 43/6, se focalise sur l’examen des manières et des moyens de surpasser les obstacles à la pleine et efficace protection des droits des migrants, en reconnaissant la vulnérabilité particulière des femmes, des enfants et des sans-papiers ou migrants dans une situation irrégulière. Étant donné que les migrations sont un phénomène de longue durée à travers l’histoire et que le nombre de migrants croît dans le monde entier, le mandat a pour but d’élaborer des recommandations pour renforcer la promotion, la protection et l’implémentation des droits des migrants en situation de vulnérabilité.   

Le Pacte Mondial pour des Migrations Sures, Ordonnées et Régulières (A/RES/73/195), adopté le 10 décembre 2018, est le premier accord intergouvernemental, préparé avec l’appui des Nations Unies, à couvrir toutes les dimensions des migrations internationales de façon globale et exhaustive. Le HCDH a accueilli le Pacte Mondial comme un cadre légal important qui place les migrants et leurs droits humains au centre de la gouvernance et des politiques migratoires afin de renforcer la protection des droits humains pour tous les migrants, indépendamment de leur statut. Fondé sur la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, le Pacte Mondial réaffirme l’obligation des Etats de respecter, protéger et satisfaire tous les droits humains de tous les migrants. En outre, les Principes et directives concernant la protection des droits humains des migrants en situation de vulnérabilité se focalisent sur la protection de la situation humanitaire des migrants qui ne peuvent pas être qualifiés de réfugiés, mais nécessitent tout de même une protection internationale en raison des situations qu’ils ont laissés derrière eux, des circonstances dans lesquelles ils voyagent ou des conditions auxquelles ils font face à l’arrivée, ou en raison de caractéristiques personnelles telles que leur âge, identité de genre, handicap ou santé. Enfin, les Principes et directives recommandés sur les droits de l’homme aux frontières internationales visent à aider les Etats de manière concrète à renforcer les capacités de respect des droits de l’homme aux frontières, en assurant les droits de l’homme en sauvetage et à l’interception, en contrôlant et évitant la détention et en permettant un retour ou un déplacement des migrants en accord avec les droits de l’homme.

Dans ce contexte, le 47ème Conseil des Droits de l’homme a tenu un dialogue interactif avec le Rapporteur Spécial sur les droits de l’homme des migrants pour apporter aux Etats des directives et recommandations afin de mettre un terme aux pratiques de refoulement et aux politiques violant les droits de l’homme des migrants. Durant ce dialogue interactif s’étant tenu les 23 et 24 juin 2021, le Conseil a examiné le rapport du Rapporteur Spécial A/HRC/47/30 sur les « moyens de répondre aux conséquences des refoulements de migrants sur la terre et en mer sur le plan des droits humains. »

Rapport du Rapporteur Spécial

Rapport A/HRC/47/30 du Rapporteur Spécial sur les droits de l’homme des migrants, Felipe González Morales : « Rapport sur les moyens de répondre aux conséquences des refoulements de migrants sur la terre et en mer sur le plan des droits humains »

Le présent rapport examine les activités du Rapporteur Spécial réalisées durant la période de réalisation du rapport. Il donne également une définition efficace des refoulements de migrants en analysant l’impact des pratiques de refoulement actuelles, y compris dans le contexte de la COVID-19. Étant donné les défis auxquels les Etats font face pour garantir aux migrants l’accès à un procès équitable et à des garanties aux frontières internationales, le rapport se focalise sur les pratiques de gouvernance des frontières sur le plan des droits humains et fait des recommandations pour répondre aux conséquences en droit humain des refoulements de migrants sur la terre et en mer. Enfin, le Rapporteur Spécial souligne que les refoulements constituent une violation des obligations internationales des Etats de protéger les droits de l’homme des migrants aux frontières internationales, particulièrement de l’interdiction des expulsions collectives et du refoulement.

Remarquant l’absence d’accord sur une définition internationale du terme refoulement dans le contexte des migrations, le rapport décrit les refoulements de migrants comme n’importe quelles mesures, actions ou politiques lancées par les États, impliquant certaines fois des pays tiers et acteurs non-gouvernementaux, entraînant l’expulsion effective des migrants, individuellement ou en groupes, y compris les demandeurs d’asile, étant sommairement renvoyés, sans examen individuel de leurs besoins de protection de leurs droits de l’homme, au pays ou territoire, ou en mer, que ce soient des eaux territoriales ou internationales, d’où il tentaient de franchir ou franchissaient la frontière. Cette définition inclut les pratiques qui ont lieu avant qu’un individu aie pénétré le territoire d’un pays aussi bien que sur le territoire, notamment en empêchant le débarquement ou la poursuite du voyage ou en expulsant les migrants hors du territoire d’un État. Elle spécifie également que la nature transnationale de certaines actions d’un État peut impliquer la responsabilité de plusieurs, par exemple dans les hautes mers et ailleurs quand les États agissent de manière extraterritoriale, mais n’exempte jamais leurs obligations et responsabilités internationales.

Les Etats se doivent de respecter et protéger les droits humains de tous les individus sur leur territoire ou sous leur juridiction ou contrôle effectif, indépendamment de leur statut migratoire et sans aucune forme de discrimination. Le cadre légal international exige des Etats qu’ils respectent l’interdiction des expulsions collectives, le principe d’égalité et de non-discrimination, le principe de non-refoulement, le droit d’asile, le droit à la vie, l’interdiction de la torture, la promotion de l’égalité des genres, et les droits et plus grands intérêts de l’enfant. En outre, les Etats doivent assurer l’accès à la justice pour les victimes de violations des droits de l’homme et ont le devoir de disposer d’un service de recherche et de secours en mer adéquat et efficace.

Les refoulements de migrants aggravent souvent les situations de vulnérabilité, notamment, mais non exclusivement celles qui découlent du genre, de l’âge, de l’ethnicité, de la nationalité, du statut migratoire, de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre. Les femmes et les enfants encourent un risque particulièrement grand de violences sexuelles ou de genre, d’abus et de trafic, ainsi qu’un risque plus grand de noyade ou d’hypothermie en cas de catastrophe maritime. En général, les refoulements compromettent l’engagement des Etats à prendre toutes les précautions raisonnables pour protéger la vie et éviter la violence excessive, et à coopérer internationalement pour sauver des vies et éviter les blessures et décès de migrants. Des circonstances exceptionnelles telles que la taille des mouvements migratoires ou l’existence d’une urgence sanitaire (COVID-19) ne justifient pas les mesures de refoulement.

Ces dernières années, des politiques et pratiques de refoulement signalées le long de la plupart des routes migratoires ont adopté une approche axée sur la sécurité qui augmente le risque de violations des droits de l’homme. De nombreuses observations ont soulevé l’inquiétude concernant la gouvernance des frontières terrestres et maritimes de la Grèce avec la Turquie et les demandeurs d’asile arrivant par la frontière terrestre de l’Evros, ainsi que les refoulements mis en place par la Croatie, l’Algérie, la Lybie, Chypre, Malte et la Pologne non conformes aux principes et obligations susmentionnés. Le rapport soulève des inquiétudes concernant le refus d’accès au territoire et/ou d’accès aux demandes d’asile mis en place par la France et la Hongrie. De plus, Le Rapporteur Spécial réexprime ses préoccupations sur l’utilisation de la force déployée dans certains refoulements, tel que des coups, des chocs électriques, des traversées de rivière forcées, des enlèvements de vêtements, des fouilles corporelles insensibles au genre et des peintures de croix à la bombe sur la tête des migrants. Dans d’autres cas, les migrants arrivant en plus grands groupes ont été visés par l’utilisation discriminatoire d’irritants chimiques, de canons à eau et de projectiles à impact cinétique par les forces de l’ordre.

Le rapport souligne que les accords bilatéraux et multilatéraux pour apporter des réponses conjointes aux défis liés aux migrations ne peuvent pas ignorer les obligations concernant les droits de l’homme ou les garanties accordées aux migrants, particulièrement l’examen individuel de la situation de chaque migrant. En outre, les États externalisent de plus en en plus les mesures de gouvernance des frontières, ce qui pourrait empêcher les migrants d’exercer leurs droits en vertu du droit international. Par exemple, le Chili, l’Equateur et le Pérou ont militarisé  leurs frontières en réponse à des mouvements importants de Vénézuéliens hors de leur pays. Le rapport exprime également des inquiétudes quant à « l’Opération Frontières Souveraines » australienne, la politique américaine appelée « Rester au Mexique », et le régime spécial appliqué dans les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. Similairement, l’Australie aurait renvoyé des bateaux de migrants de différentes manières, tandis que l’Italie a été jugée responsable d’avoir échoué à secourir un bateau transportant environ 200 migrants, dont 60 enfants, qui sont décédés en raison de ce retard ; la coopération entre l’Italie et la Lybie a mené au contournement de l’interdiction de refoulement et d’expulsions collectives. L’absence de mécanismes régionaux de partage de responsabilité dans la région Asie-Pacifique et les opérations de FRONTEX aux frontières externes de l’UE représentent aussi une source de préoccupation.

La pandémie de la COVID-19 a rendu la gouvernance des frontières encore plus compliquée. Étant donné que les refoulements peuvent être reliés au manque de préparation pour fournir une aide à l’entrée et à la réception en accord avec les droits des migrants et à la méconnaissance des obligations étatiques, les États devraient s’assurer que le personnel en contact avec les migrants aux frontières ait connaissance des lois et normes des droits de l’homme, ainsi que des garanties procédurales, tout en mettant en œuvre des protocoles de contrôle et de renvoi. De plus, les acteurs humanitaires, les défenseurs de droits de l’homme et la société civile font face à plusieurs obstacles dans la conduite de leurs activités professionnelles. Dans ce contexte, le Rapporteur Spécial accueille avec satisfaction la proposition de la Commission Européenne, dans son Nouveau Pacte sur la Migration et l’Asile, pour établir des mécanismes nationaux indépendants pour superviser l’application des droits de l’homme aux frontières de l’Union Européenne.

En dépit de nombreuses législations nationales protégeant les droits de l’homme des migrants, l’impunité est toujours prévalente pour les refoulements. Dans de nombreux pays, l’accès à la justice pour les migrants est sévèrement compromis par le manque ou l’incapacité des mécanismes de contrôle interne à traiter et prévenir les violations de façon adéquate ; le contrôle indépendant des droits humains aux frontières est irrégulier et ne peut pas prévenir en lui-même les violations et abus sans la coopération de l’État qui doit se conformer aux lois et normes internationales. Par conséquent, le Rapporteur Spécial exhorte les Pays Membres à mettre un terme aux pratiques de refoulement, en recommandant aux États de ratifier et d’implémenter, notamment à travers l’harmonisation des lois nationales, les instruments internationaux des droits humains appropriés et d’adopter une approche fondée sur les droits de l’homme, sensible à l’âge et aux enfants et genrée pour protéger et garantir les droits de l’homme des migrants.

 

Dialogue Interactif avec le Rapporteur Spécial

Genève, 23 et 24 juin 2021- Lors des 6ème et 8ème réunions de la 47ème session du Conseil des droits de l’homme, le Rapporteur Spécial a tenu un dialogue interactif avec des parties prenantes, selon le point 3 de l’agenda.

Mr Felipe González Morales a commencé le dialogue interactif en plaçant l’analyse des impacts de la pandémie du COVID-19 au cœur de son mandat et en soulignant l’importance de la garantie de l’accès à un vaccin pour tous les migrants. Étant donné que les refoulements de migrants deviennent un phénomène mondial très répandu qui suscite des inquiétudes à propos des droits de l’homme des migrants, le rapport apporte des recommandations aux États avec pour objectif principal de répondre aux préoccupations sur le respect des droits de l’homme liées aux mesures de refoulement et de trouver des solutions aux refoulements préjudiciables des migrants sur la terre et en mer. De plus, le Rapporteur Spécial a remercié les États, les entités de l’ONU, les institutions de droits de l’homme et les organisations de la société civile pour leurs importantes contributions au présent rapport.

Mr Felipe González Morales en est venu à faire remarquer que l’examen des politiques et pratiques de refoulement actuelles révèle que les États répondent souvent aux mouvements migratoires par la création et le renforcement progressif des douanes, ce qui mène au retour des migrants sans examen individuel de leurs besoins en matière de protections de leurs droits humains et des mesures de garanties qui leur sont accordées. Comme cité dans le rapport, le Rapporteur Spécial a souligné que sans examen individuel de la situation de chaque migrants ou autre procédure de protection, les refoulements de migrants violent l’interdiction d’exclusions collectives ce qui à son tour exacerbe les dangers de violations des droits de l’homme. Puisque les refoulements sont incompatibles avec les obligations internationales des États, le Rapporteur Spécial a appelé les gouvernements à cesser de telles pratiques et à assurer la protection totale des droits de l’homme.

Dans le débat qui suivit, les délégations ont exprimé leur soutien au rapport (A/HRC/47/30), reconnaissant que les pratiques de refoulement constituent une sérieuse violation des obligations internationales et des droits de l’homme des migrants quand conduites sans examen individuel ni procédures de protection.

L’Union Européenne a réitéré son plein engagement à respecter les obligations des États en vertu du droit international ainsi que les droits de l’homme de tous les migrants, en prenant sérieusement en considération les allégations de mauvais traitement tout en menant des enquêtes appropriées à leur sujet auprès des autorités compétentes. L’UE a regretté que le rapport échoue à reconnaître les efforts extraordinaires fait par les gouvernements européens pour assumer leurs responsabilités malgré la pandémie et à voir comment ils avaient assuré le bien-être, la protection et l’assistance à des milliers de migrants et réfugiés arrivant aux frontières de l’Union Européennes ou secourus en mer.

La Suède, au nom des pays nordiques et baltiques, le Danemark, l’Estonie, la Finlande, l’Islande, la Lettonie, la Lituanie et la Norvège, a exprimé de profondes inquiétudes concernant les résultats du rapport. Le groupe de pays a souligné que les flux migratoires mixtes représentent des défis complexes et par conséquent nécessitent des systèmes de gestion des migrations complets, incluant l’enregistrement, l’évaluation des besoins de protection et le traitement des demandes d’asile ; il exige également le bon fonctionnement du retour et de la réadmission de ceux qui ne possèdent pas le droit légal de rester. L’engagement à respecter les droits de l’homme des réfugiés et migrants indépendamment de leur statut, en particulier pour les enfants, doit rester fort. Un système d’asile efficace, qui garantit l’examen individuel des motifs de leur demande, dans le respect de l’État de droit, doit exister.

La Chine, au nom d’un groupe d’États, a exprimé son inquiétude quant à la variété des violations des droits de l’homme auxquelles sont confrontés les enfants, ce qui augmente le risque de violence, d’exploitation et d’abus. Le pays a condamné l’emprisonnement des enfants qui entrave la pleine jouissance de leurs droits, la séparation forcée avec leurs parents qui mène à la division des familles, et la privation d’une protection essentielle et de services incluant l’accès à la santé et à l’éducation. Le pays a appelé les États à garantir que les normes et principes de la Convention des Droits de l’Enfant soient respectés sans aucune forme de discrimination et indépendant de leur statut de migrant. Afin de mettre un terme à ces sérieuses violations des droits de l’homme qui ne sont pas dans l’intérêt de l’enfant et qui peuvent avoir des effets négatifs de long terme, une approche axée sur l’enfant doit représenter un élément essentiel des politiques et de la législation migratoire de chaque État.

Cuba a réitéré son engagement pour la protection des individus en situation de grande vulnérabilité, particulièrement les femmes et les enfants, et a rejeté l’utilisation des processus migratoires à des fins politiques, comme l’utilisation injustifiée du droit d’asile contre certains pays. Le pays a exprimé des inquiétudes quant à la situation des migrants souffrant de discrimination, de xénophobie, de racisme et d’intolérance dans plusieurs pays développés. Cuba a dénoncé le blocus illégal imposé par les États Unis à son encontre, créant un obstacle au développement du pays et stimulant des migrations irrégulières.

Le Bangladesh a exprimé des inquiétudes quant à l’impact disproportionné de la COVID-19 sur les migrants, y compris la stigmatisation et la discrimination dans l’accès aux soins médicaux et aux vaccins. Le pays a demandé à ce que le Rapporteur Spécial contribue à assurer l’égal accès aux vaccins contre la COVID-19 pour tous les migrants.

La République Arabe de Syrie a condamné les politiques utilisées par certains pays générant un impact négatif sur les droits de l’homme, sur le développement économique et social, et sur les activités humanitaires dans d’autres pays, notamment des actes d’agression militaire et économique qui constituent une cause directe des flux migratoires. Les difficultés de la vie quotidienne poussent un grand nombre de Syriens à quitter le pays en tant que réfugiés ou migrants, certains d’entre eux empruntant des routes illégales en falsifiant des documents et en payant d’énormes sommes d’argent à des réseaux de passeurs qui les exploitent aux frontières. Ces réalités confirment l’importance de s’intéresser aux facteurs qui aident les personnes à construire et à conserver des moyens de subsistance durables dans leur pays d’origine afin de mieux gérer les migrations nationalement, régionalement et mondialement.

La Grèce a noté avec regret que les refoulements de migrants étaient décrits dans le rapport comme un phénomène occurrent dans les hautes mers juste entre les deux acteurs, c’est-à-dire les migrants et l’État côtier d’accueil, sans considérer le rôle important joué par les pays de transit. Comme documenté, le pays a souligné que certains pays de transit n’échouent pas seulement à respecter les obligations internationales, telles que la prévention des départs réguliers et de démantèlement des réseaux de passeurs, mais organisent également des rejets de migrants vers d’autres pays qui violent les droits des migrants et instrumentalisent la souffrance humaine.

Le Salvador a mentionné la stratégie que le gouvernement est en train de mettre en place en collaboration avec l’UNHCR afin de sensibiliser et de former les autorités chargées des migrations et la police sur les obligations internationales relatives aux droits des migrants.

La Turquie a exprimé son inquiétude quant aux continuels refoulements, aux situations de détention arbitraire, de mauvais traitements, et de conditions de vie inhumaines des demandeurs d’asile et réfugiés en Grèce et a trouvé alarmant le nombre de refoulements de la Grèce vers la Turquie.

ONU Femmes a souligné l’importance de l’adoption d’une approche genrée dans les migrations et la gouvernance des frontières, en raison des impacts néfastes que les refoulements ont sur la perpétuation des violence sexuelles et de genre. En outre, ONU Femmes accueille avec satisfaction l’attention portée par le rapport aux défenseurs des droits des femme et au travail qu’ils ont effectué pour protéger les droits de l’homme des migrants en sensibilisant sur l’intimidation et le harcèlement auxquels ils continuent de faire face. Il est crucial que les défenseurs des droits de l’homme n’aient pas à se confronter à des obstacles pratiques et légaux dans l’exercice de leur fonction, y compris le traitement et le suivi des cas de refoulement.

Des organisations de la Société Civile ont accueilli avec satisfaction le rapport complet du Rapporteur Spécial dénonçant l’usage des refoulements pour priver les migrants de leurs droits fondamentaux en leur refusant l’accès à la protection requise aux niveaux national et international. Une ONG a exprimé son inquiétude quant aux enfants continuant d’être privés de leurs libertés dans beaucoup de pays, et a appelé les États à combler les failles concernant l’accès aux procédures d’asile, notamment l’utilisation de procédures d’évaluation de l’âge pour la protection de l’enfant, et des assistances juridiques efficaces. Une autre ONG a souligné qu’en Argentine, les migrants avaient été les plus affectés par la COVID-19 :  53% des migrants ont partiellement ou totalement perdu leurs revenus et la situation est aggravée par leur exclusion aux programmes d’aide à la relance. En outre, certaines ONG ont déclaré qu’à la place d’interrompre les migrations, la fermeture des frontières a mené à l’augmentation du nombre de personnes faisant face à des difficultés pour se régulariser et chercher une protection.

Après les interventions des États Membres, des Observateurs, des institutions nationales des droits de l’homme et des organisations de la Société civile, Mr Felipe González Morales a fait ses remarques finales, en soulignant que les refoulements de migrants représentent une des violations des droits de l’homme les plus violentes et répétées qu’il a observé au cours de son mandat. Bien que les considérations de sécurité faites par les États soient tout à fait légitimes, elles ne peuvent pas se faire au détriment des droits de l’homme des migrants. Il est aussi alarmant que les pratiques de refoulement se soient aggravées avec l’explosion de la pandémie de la COVID-19, exacerbant par conséquent les violations des droits de l’homme des migrants. Afin de combattre de telles violations, le Rapporteur Spécial a recommandé de conduire de sérieuses enquêtes sur les refoulements de migrants et de renforcer les mécanismes de contrôle nationaux, régionaux et internationaux ; a invité le Conseil des droits de l’homme à surveiller de près et à suivre la question des refoulements ; et a exhorté les États d’agir au niveau national. Mr Felipe González Morales a conclu en soulignant qu’une perspective genrée devrait être une composante essentielle de toute politique visant à lutter contre les refoulements de migrants, ainsi que l’importance d’une coopération internationale dans le sauvetage en mer, et le travail crucial des organisations de la Société civile qui ne devraient pas être criminalisées pour leurs actions.

 

Position de Geneva International Center for Justice

Le Geneva International Center for Justice accueille avec satisfaction le rapport du Rapporteur Spécial sur les moyens de répondre aux conséquences des refoulements de migrants sur la terre et en mer sur le plan des droits de l’homme en apportant des recommandations et directives pour cesser de telles pratiques.

GICJ affirme de nouveau que les pratiques et mesures de refoulement ne sont pas conformes aux obligations et normes internationales de protection des droits de l’homme des migrants aux frontières internationales, notamment l’interdiction des expulsions collectives et du refoulement. Par conséquent, il existe un risque sérieux de violation de plusieurs droits fondamentaux des migrants quand de telles pratiques ont lieu. Cela inclut, mais ne se limite pas au droit à la non-discrimination, le droit de demande d’asile, le droit à la vie et les droits et meilleurs intérêts de l’enfant. De plus, les mesures et pratiques de refoulement peuvent exacerber le discours anti-migratoire auquel les migrants sont confrontés à travers les discours haineux, le rejet, l’intolérance et la violence dans le pays d’accueil, ce qui à son tour fragilise la situation les migrants, mettant davantage en péril leurs droits humains.

A cet égard, GICJ reste engagé dans la protection des droits de l’homme de tous les migrants, indépendamment de leur statut, et invite les États à implémenter et ratifier tous les instruments internationaux appropriés et à harmoniser les lois nationales avec les obligations et normes internationales. Les droits de l’homme de tous les migrants arrivant aux frontières doivent être respectés et protégés, et particulièrement leur droit de recevoir un examen individuel de leur situation. Surtout, les États devraient construire un cadre légal et pratique au niveau international à travers la coopération des pays d’origine, de transit et d’accueil qui devraient créer des routes légales sûres, combattre le trafic de migrants et les réseaux de trafic d’êtres humains, et assurer des conditions de vie essentielles. GICJ invite tous les acteurs à implémenter une approche de la sécurité humaine focalisée sur le traitement des causes profondes des flux migratoires en développant des stratégies de prévention et en promouvant une plus forte aide et des programmes sur les droits de l’homme dans les pays d’origine, particulièrement ceux affectés par des guerres, conflits ou catastrophes inattendues.

 

Read in English : https://www.gicj.org/conferences-meetings/human-rights-council-sessions/discussion-reports/2122-interactive-dialogue-with-special-rapporteur-on-human-rights-of-migrants

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