Dialogue interactif avec le Rapporteur spécial sur le Myanmar

11-12 Mars 2021

46ème session du Conseil des droits de l'homme

Écrit et traduit par Clélia Jeandin/GICJ

Thomas Andrews, Rapporteur spécial pour le Myanmar

Au Myanmar, la population traverse une crise politique et humanitaire sans précédent. Le 1 er février 2021, la Tatmadaw (les forces militaires nationales) s’est emparée du pouvoir et a arrêté des douzaines de membres de la Ligue Nationale pour la Démocratie (National League for Democracy, NLD), dont la dirigeante du parti Aung San Suu Kyi. Le coup d'État a eu lieu après 10 ans de transition démocratique, il ravive des souvenirs douloureux de la dictature militaire endurée par le pays pendant des décennies. La Tatmadaw a déjà entamé un démantèlement progressif des institutions démocratiques établies ces dernières années, affaiblissant dangereusement les espoirs d’une résolution pacifique de la crise. En outre, la junte militaire n’a fait preuve d’aucune retenue dans sa réponse aux manifestants : à dater du 13 avril 2021, plus de 700 personnes ont été tuées pendant les manifestations, en plus des milliers encore détenues arbitrairement.

Le Rapporteur Spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar Thomas Andrews a fourni un compte-rendu compréhensif de la situation actuelle au Myanmar, ainsi que des recommandations destinées aux États membres. Alors que les manifestations rassemblent de plus en plus de personnes, la réponse des forces de l’ordre s’est faite de plus en plus disproportionnée, notamment par l’instauration de nouvelles lois qui criminalisent les manifestants, et par la normalisation de la surveillance et de fréquentes coupures des réseaux de communication. Andrews a également abordé la situation des droits de l’homme observée dans les mois qui ont précédé le coup : les minorités ethniques, surtout les Rohingyas, continuent de faire face à de nombreuses discriminations et à la violence des autorités. La crise sanitaire a exacerbé la situation des minorités les plus vulnérables, et un soutien humanitaire est requis au plus vite.

 M. Chan Aye, Secrétaire permanent du ministère des affaires étrangères

Au cours du Dialogue Interactif avec le Rapporteur Spécial, les 11 et 12 mars, Andrews a formulé des recommandations à l’égard des États et des entreprises internationales afin de susciter un soutien international et de mettre fin à la crise. Il a notamment recommandé que les flux de revenus, d’armes, et d’aide destinés aux structures gérées par les autorités militaires soient interrompus. Il a également incité les États à refuser de reconnaître la Tatmadaw en tant que gouvernement légitime du Myanmar, et d’initier des investigations des crimes commis. La majorité des états participant au Dialogue Interactif a soutenu ses demandes (notamment l’Union Européenne, le Royaume Uni, et les Etats-Unis) ; toutefois, certains états connus pour leur rejet de toute sanction internationale initiée par l’ONU (plus particulièrement la Russie, la Chine et le Venezuela), ont fermement rejeté les déclarations d’Andrews. Ils ont jugé l’atmosphère du Conseil des Droits de l’Homme politisée, et dénoncé une approche biaisée de la situation actuelle au Myanmar. Le représentant du Myanmar a nié les accusations d’Andrews, en insistant sur la nature interne de la crise actuelle. Il a par ailleurs maintenu les accusations de fraude émises à propos des élections de novembre 2020, et a annoncé que des mesures seraient prises afin de contrôler les listes électorales à nouveau.

GICJ condamne les actions de la Tatmadaw et soutient les déclarations d’Andrews. La communauté internationale doit agir afin de mettre fin aux crimes commis par les autorités militaires et de restaurer la justice et la démocratie au Myanmar.

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