Changement politique en Syrie : Le retour des Syriens
Traduit par Hind Raad Gathwan/GICJ
Après 14 ans de guerre et de destruction, la révolution politique en Syrie a suscité l’espoir chez des millions de demandeurs d’asile, de réfugiés et de personnes déplacées internes (PDI) qui ont été forcés de fuir leurs foyers en raison du conflit syrien et des crises humanitaires qui en ont découlé. Selon le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires, 7,4 millions de personnes étaient déplacées à l’intérieur de la Syrie avant les derniers développements, dont 2,3 millions vivant dans des camps. Au total, 16,7 millions de personnes dépendent de l’aide humanitaire dans tout le pays.
Le 2 janvier, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) rapporte que près de 500 000 PDI sont retournées dans leurs régions d’origine, tandis que les pays voisins, dont l’Irak, le Liban et la Jordanie, signalent le retour définitif de plus de 100 000 réfugiés syriens. Parmi ces réfugiés, certains évaluent la sécurité et la stabilité de la Syrie avant de revenir définitivement avec leurs familles. Le HCR rapporte un flux « faible mais constant » de Syriens quittant le Liban, avec entre 100 et 200 personnes traversant les zones de non-droit sur une période de 10 jours. Bien que la guerre soit enfin terminée, des insécurités persistantes demeurent alors que la nation se reconstruit sous un nouveau pouvoir. De plus, les conditions hivernales se révèlent particulièrement difficiles pour les Syriens déplacés qui sont déterminés à rentrer chez eux.
Pour de nombreux Syriens déplacés, la décision de revenir repose sur un mélange de facteurs d’incitation et de contrainte. D’une part, la détérioration des conditions dans les pays d’accueil, telles que les opportunités économiques limitées et les politiques restrictives, rend la vie de plus en plus difficile. D’autre part, l’attachement à leur pays natal, profondément enraciné dans leur identité et leur culture, est un puissant moteur de retour. Le sentiment de responsabilité envers la reconstruction de la Syrie motive également de nombreux rapatriés. Après avoir assisté à la destruction de leur pays depuis l’étranger, beaucoup ressentent un devoir moral de participer à sa reconstruction.
« Nous voulons reconstruire nos maisons et rebâtir nos vies. La Syrie a besoin de nous plus que jamais. » — Un rapatrié à la frontière turque.
Malgré ces développements positifs, le retour en Syrie implique de nombreux défis. Une grande partie des infrastructures du pays reste en ruines, avec des services de base tels que l’électricité, l’eau et les soins de santé encore en cours de restauration. Des villes comme Alep et Raqqa portent les cicatrices de plusieurs années de combats intenses, avec des quartiers entiers réduits en décombres. Un élément clé pour assurer le retour sécurisé des Syriens est la création d’un environnement à la fois sûr et habitable. Les zones dévastées par la guerre contiennent encore des dangers, tels que des munitions non explosées, des mines terrestres et des bâtiments instables, qui représentent des risques considérables pour les rapatriés. Il est essentiel de prioriser le déminage et le retrait de ces menaces pour éviter de nouvelles tragédies et rassurer ceux qui envisagent de revenir. Par ailleurs, la sécurité reste une préoccupation majeure. Bien que les combats à grande échelle aient cessé, des violences sporadiques et des conflits localisés persistent. De plus, l’avenir politique de la Syrie reste incertain, et de nombreux rapatriés craignent une instabilité future.
L’Organisation Internationale pour les Migrations en Syrie
L’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) est active en Syrie depuis 2001 pour répondre aux besoins humanitaires des migrants, des personnes déplacées internes (PDI) et des communautés hôtes. En raison des récents changements politiques et de la crise humanitaire persistante, l’OIM a augmenté son appel de fonds pour la Syrie à 73,2 millions de dollars américains. Ce financement vise à aider plus de 1,1 million de personnes dans tout le pays au cours des six prochains mois, en se concentrant sur les besoins humanitaires immédiats et en soutenant la transition du pays après la chute du gouvernement de Bachar al-Assad.
Bien que la communauté internationale reconnaisse l’importance d’assurer un retour volontaire et sécurisé des Syriens, l’OIM souligne que ces retours doivent être gérés avec précaution afin d’éviter de surcharger les infrastructures locales et d’aggraver les tensions dans des régions déjà fragiles. Amy Pope, Directrice générale de l’OIM, s’est rendue à Damas après la chute du régime Assad. Lors d’un point de presse à son retour, Mme Pope a exprimé ses préoccupations quant aux retours massifs de réfugiés, soulignant qu’un afflux important de rapatriés risquerait de compromettre les efforts de reconstruction en mettant à rude épreuve un État déjà fragile.
Grâce à des partenariats avec des organisations locales et internationales, l’OIM mène des campagnes de sensibilisation et soutient les efforts de déminage pour rendre ces zones plus sûres pour les rapatriés. L’organisation travaille également au rétablissement de systèmes de surveillance afin d’évaluer les conditions des rapatriés et leur processus de réintégration. Ces systèmes fournissent des données précieuses pour adapter les programmes d’aide aux besoins réels des rapatriés, notamment en matière d’accès aux soins de santé, d’éducation et d’opportunités d’emploi.
Les changements politiques en cours marquent un tournant pour la Syrie et suscitent de l’espoir chez des millions de déplacés cherchant à reconstruire leur vie. Si le retour de centaines de milliers de Syriens témoigne d’une volonté d’ouvrir un nouveau chapitre, d’importants défis subsistent, notamment la destruction des infrastructures, les préoccupations sécuritaires et la fragilité des ressources locales. Les efforts d’organisations comme l’OIM sont essentiels pour garantir que les retours soient sûrs, durables et bien encadrés, permettant ainsi à la Syrie de progresser vers la reconstruction et la stabilité à long terme.
Geneva International Centre for Justice (GICJ) reconnaît que le changement politique en Syrie représente un moment crucial pour le pays et son peuple. Si la fin des hostilités à grande échelle redonne de l’espoir aux Syriens déplacés, le GICJ souligne la nécessité d’une approche globale et humanitaire pour reconstruire la nation. Il est impératif de s’attaquer aux causes profondes du déplacement, d’assurer la responsabilité des crimes de guerre et de donner la priorité à la sécurité et au bien-être des rapatriés. Le GICJ appelle la communauté internationale à soutenir la reconstruction de la Syrie à travers l’aide humanitaire, le déminage et la réhabilitation des infrastructures, tout en garantissant le respect des droits humains pour tous les Syriens. De plus, le GICJ insiste sur l’importance d’une gouvernance inclusive et des efforts de réconciliation pour favoriser une paix et une stabilité durables. Tout processus de retour doit être volontaire, sécurisé et durable, garantissant que ceux qui choisissent de rentrer puissent le faire sans crainte ni insécurité.Le GICJ reste déterminé à défendre la justice, la responsabilité et les droits humains de toutes les personnes affectées par le conflit syrien.
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SOURCES
[1]https://elpais.com/internacional/2024-12-09/cientos-de-refugiados-sirios-en-turquia-se-agolpan-en-la-frontera-volveremos-y-reconstruiremos-el-pais.html
[2]https://www.thenewhumanitarian.org/news-feature/2024/12/19/syrians-begin-return-destroyed-homes-will-others-follow
[3] https://webtv.un.org/en/asset/k1n/k1ng2u7icb
[4] https://www.iom.int/return-and-reintegration?utm_source=.com
Photo: UNHCR