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Par Yazan Hamid / GICJ

Traduit par Hind Raad Gathwan /GICJ

La crise mondiale des déplacements a atteint des niveaux records, et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) fait état de 120 millions de personnes déplacées dans le monde, soit plus que tout autre moment depuis la Seconde Guerre Mondiale (2024 flagship Global Trends Report, UNHCR). Les réfugiés, les migrants, les apatrides, dont la majorité sont des femmes et des enfants, sont confrontés à une précarité imminente ainsi qu’à la traite des êtres humains dans le cadre d’une migration irrégulière.

Tandis que les statistiques sur la traite des êtres humains manquent de précision uniforme en raison des circonstances complexes des personnes impliquées ainsi que de la crise corrélative des disparitions forcées, l'Organisation Internationale du Travail (OIT) estime que  chaque année 28 millions de personnes sont victimes de la traite des êtres humains dans le monde (estimations mondiales 2022, OIT). Cela contribue ainsi à une industrie de 236 milliards de dollars alimentée par l'exploitation sexuelle, le travail forcé et le mariage forcé.

Le Protocole des Nations Unies visant à prévenir, réprimer et punir la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants - un supplément à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée - a été adopté et ouvert à la signature, à l'adhésion et à la ratification par la résolution 55/12 de l'Assemblée générale en novembre 2000 ; ratifié en 2003.

Depuis lors, il existe une négligence constante et préoccupante dans la mise en œuvre de mécanismes efficaces pour lutter contre les différentes facettes de la traite des êtres humains.

Il subsiste un manque important de mécanismes efficaces pour traiter les questions interdépendantes de la migration irrégulière et de la traite des êtres humains.

Les voies migratoires illégales et irrégulières exposent souvent les personnes impliquées à de graves risques, notamment l’exploitation et la traite des êtres humains.Les migrants dépourvus de statut légal ou de documents appropriés sont particulièrement vulnérables aux trafiquants qui exploitent leurs situations précaire. Les femmes et les enfants sont touchés de manière disproportionnée et sont souvent victimes d'exploitation sexuelle, de travail forcé et d'autres formes d'abus. Les approches punitives de la migration irrégulière adoptées par de nombreux pays exacerbent ces vulnérabilités. Les migrants, les réfugiés et les apatrides, qui peuvent être soumis à de lourdes sanctions, à la détention et à l'expulsion, sont plus susceptibles de compter sur les passeurs et les trafiquants pour échapper aux autorités. Cette dynamique crée un cycle d’exploitation dans la mesure où les migrants sont contraints à la servitude pour dettes ou à d’autres formes de coercition pour payer leur passage.

Les efforts de la mise en œuvre du Protocole des Nations Unies visant à prévenir, réprimer et punir la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, ont été confrontés à des défis multidimensionnels. De nombreux États membres ont été critiqués pour leur application inadéquate des lois anti-traite et leur manque de services de soutien aux victimes. La Rapporteuse Spéciale sur la traite des êtres humains, Mme Siobhan Mullaly, dans son dernier rapport au Conseil des Droits de l'Homme des Nations Unies (UNHRC), a souligné les lacunes importantes des États membres dans la mise en œuvre de mécanismes visant à fournir des voies de migration sûres et régulières (27 Juin 2024). Ces échecs ont perpétué les risques associés à la migration irrégulière et à la traite des êtres humains.

L’un des principaux obstacles à la résolution des crises étroitement liées à la migration irrégulière est le manque d’efforts coordonnés de la part de la communauté internationale. Bien qu’il existe divers accords et protocoles internationaux, leur mise en œuvre est souvent fragmentée et incohérente. Ce manque de coordination entrave le développement d’une réponse unifiée et efficace à la traite des êtres humains et à la migration irrégulière. Parmi ces obstacles figure le manque de ressources et d’infrastructures nécessaires pour lutter efficacement contre la traite des êtres humains et soutenir les victimes. Cela inclut un financement insuffisant pour les forces de l’ordre, les services aux victimes et les programmes de prévention. De plus, la stigmatisation des victimes de la traite et des migrants irréguliers les empêche de demander de l’aide, ce qui aggrave encore leur vulnérabilité. Ces victimes peuvent souvent faire l'objet d'une criminalisation, contrairement aux principes de non-sanction.

Diverses initiatives régionales et nationales ont été entreprises pour faire face à ces crises, notamment la stratégie de l'Union Européenne de lutte contre la traite des êtres humains, qui se concentre sur la prévention, la protection des victimes, la poursuite des trafiquants et le partenariat avec les pays tiers. Malgré ces efforts, les incohérences des politiques nationales et des mécanismes d’application continuent de nuire à l’efficacité globale de la stratégie. Nous pouvons ici analyser l'importance de l'implication de la société civile. Des puissantes entreprises solidement ancrées dans de grandes industries qui sont souvent impliquées restent capables de se débrouiller sans poursuites appropriées.

La stigmatisation des victimes de la traite des personnes et des migrants irréguliers accroît leurs défis, tandis que la société civile reste complice en raison d'une xénophobie généralisée et de la normalisation de l'hostilité.

Les crises étroitement liées à la traite des êtres humains posent des défis importants à la Communauté Internationale.

Malgré divers protocoles internationaux et initiatives nationales, des lacunes critiques subsistent dans la mise en œuvre des mécanismes efficaces pour protéger les populations vulnérables et lutter contre les réseaux de traite des êtres humains.

Faire face à ces crises nécessite une approche coordonnée et globale qui comprend l'élargissement des voies de migration sûres, la protection des défenseurs des droits de l’homme impliqués dans les opérations de recherche et de sauvetage, le renforcement de la coopération internationale et la fourniture de ressources et de services de soutien adéquats aux victimes.

Geneva International Centre for Justice (GICJ), reconnaît l’immense progrès accomplis par la Communauté Internationale dans sa lutte contre ces crises. Nous appelons le Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, ainsi que les organisations de la société civile, à rester fermes dans leur engagement à démanteler ces industries. En outre, nous saluons le travail de la Rapporteuse spéciale sur la Traite des Etres Humains, Mme Siobhan Mullaly, dans ses efforts diligents pour renforcer l'implication cruciale de la Communauté Internationale et son plaidoyer sans précédent en faveur des personnes impliquées. Cependant, nous reconnaissons les lacunes importantes de la lutte contre ces crises et exhortons la Communauté Internationale à s’attaquer collectivement à la triste réalité de la situation actuelle de la traite des êtres humains et de la migration irrégulière. Ce n’est que grâce à de tels efforts que la communauté internationale pourra espérer atténuer les risques associés à la migration irrégulière et à la traite des êtres humains et offrir une protection significative à ceux qui en ont besoin.

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